La Guinée s’apprête à aller au référendum dans quelques semaines, après une transition de quatre ans. Sur les pages officielles de plusieurs institutions publiques, notamment celles de certains ministères, une même image de campagne apparaît en photo de profil.
Cela m’amène à m’interroger sur la place de la communication publique dans nos administrations. En période de référendum, la communication autour d’un projet de constitution devrait obéir à trois principes fondamentaux : neutralité, transparence et accessibilité de l’information. Le rôle des ministères et des institutions publiques n’est pas de prendre position en faveur d’une option, mais de garantir que chaque citoyen dispose des informations nécessaires pour exercer librement son droit de vote.
Or, ce que l’on observe en Guinée révèle une confusion entre communication publique et communication politique. Au lieu d’assurer une vulgarisation neutre du contenu de la nouvelle constitution , expliquer ses articles, ses innovations, ses implications pour la vie quotidienne , les institutions publiques s’engagent dans une campagne partisane pour le “oui”. Cela traduit une double dérive : la politisation de l’administration, qui devient un outil au service d’un camp et la personnalisation du pouvoir, où l’État se confond avec la figure du dirigeant.
Pourtant, l’administration publique n’est pas politique. Elle est censée représenter l’État, et non un parti. Sa mission est de mettre en œuvre les politiques publiques décidées par les autorités élues, mais avec une neutralité et une continuité qui dépassent les alternances politiques.
Un autre problème se situe dans la manière de vulgariser la constitution. Plutôt que d’aider les citoyens à comprendre et à se forger une opinion éclairée, les messages officiels s’appuient sur des promesses simplifiées et parfois trompeuses.
Prenons l’exemple de l’école gratuite, cet argument est mal choisi, car l’école publique a toujours été gratuite en Guinée. La vraie question est celle de la qualité et de l’accessibilité : dans quelles conditions étudie-t-on dans les écoles publiques ? Quelles mesures ont été prises pour encourager les parents à les préférer aux écoles privées ? Et jusqu’à quel niveau (primaire, secondaire, supérieur master inclus ?) la gratuité s’applique-t-elle réellement, comment?
Concernant la couverture sanitaire universelle, il ne suffit pas d’annoncer un droit. Encore faut-il en expliquer les mécanismes : financement, impôts, conditions d’accès, infrastructures médicales disponibles. Dans des pays comme la France, la couverture santé repose sur un système fiscal et de cotisations sociales, encadré par des procédures claires. Ici, rien de tel n’est détaillé lors des campagnes de vulgarisation.
La communication autour de ce projet, à cessé d’être une information citoyenne et devient une propagande partisane. Or, une communication publique responsable devrait :
• Fournir un accès équitable et compréhensible au texte constitutionnel ;
• Mettre en place des débats pluralistes où les arguments du “oui” comme du “non” peuvent s’exprimer ;
• Respecter la neutralité institutionnelle pour préserver la crédibilité de l’État et la confiance des citoyens.
La situation actuelle révèle un déficit de culture de communication publique en Guinée. Une administration véritablement républicaine doit rester à distance des luttes partisanes et garantir que ses actions servent l’ensemble de la population, indépendamment du pouvoir en place.
Aminata Doumbouya
Communicante