L’interrogatoire de Dr Mohamed Diané, ancien Ministre de la Défense nationale, s’est poursuivi ce jeudi devant la chambre des appels de la cour de répression des infractions économiques et financières. Les avocats de l’ex-ministre, Me Almamy Samory Traoré et Me Sidiki Bereté, ont concentré leurs efforts sur la disculpation de leur client, remettant en question les fondements de la condamnation prononcée en décembre 2024.
Le 18 décembre 2024, Mohamed Diané a été condamné à payer 500 millions de francs guinéens à titre de dommages et intérêts, ainsi qu’une somme de 500 milliards de francs guinéens pour des préjudices économiques présumés. Le jugement fait état d’un écart de 500 milliards entre les crédits reçus et les dépenses exécutées pendant son mandat au ministère de la Défense entre 2016 et 2021. Cependant, l’ancien ministre conteste ces accusations, affirmant que les montants mentionnés dans le jugement ne correspondent pas à la réalité.
Lors de l’audience de ce jour, Me Samory Traoré a interrogé son client sur la nature des crédits alloués au ministère de la Défense. Mohamed Diané a expliqué que les budgets votés par l’Assemblée nationale étaient des prévisions et non des fonds immédiatement disponibles. « Le budget est une prévision, ce n’est pas de l’argent en espèces déposé dans les coffres du ministère », a-t-il déclaré. Il a également souligné que sans l’autorisation du ministère des Finances, aucun crédit ne pouvait être décaissé, rendant impossible un détournement tel qu’allégué.
L’ancien ministre a également été interrogé sur les dépenses exécutées pendant son mandat. Il a affirmé que toutes les dépenses obligatoires, notamment les salaires des militaires, avaient été honorées sans aucun déficit. « Y a-t-il eu un seul militaire qui n’a pas reçu son salaire ? À ma connaissance, non », a-t-il interrogé et répondu. Il a ajouté qu’aucun document comptable ou rapport d’inspection n’avait été présenté pour prouver un quelconque détournement.
Les avocats de Mohamed Diané ont également demandé la comparution de l’intendant du ministère de la Défense, le colonel Gassim Traoré, qui était en poste pendant la période concernée. « C’est lui qui gérait les comptes. Pourquoi n’est-il pas ici pour témoigner ? », a demandé Me Sidiki Bereté. Cette demande a été soumise à la cour, qui devra décider de la suite à donner.
La défense a présenté un récapitulatif détaillé des budgets alloués au ministère de la Défense entre 2016 et 2021, basé sur les lois de finances initiales et rectificatives. Selon ces documents, le budget annuel du ministère n’a jamais dépassé 2 000 milliards, sauf en 2021, où il a atteint 2 400 milliards. « Le juge a affirmé que plus de 2 000 milliards étaient gérés chaque année, mais les chiffres prouvent le contraire », a déclaré Me Traoré.
L’agent judiciaire de l’Etat représenté par Me Pépé Antoine Lamah à sollicité qu’ en plus des infractions déjà évoquées, notamment le détournement de deniers publics, le blanchiment de capitaux et l’enrichissement illicite, que le débat s’ouvre sur une possible requalification des faits. Il a notamment insisté sur l’importance d’examiner les actes du prévenu sous l’angle de la corruption, en se fondant sur l’article 52 de la loi portant prévention, détection et répression de la corruption. Le Ministère public abonde dans le même sens. Le juge Daye Mara a d’abord rejeté la demande de requalification des faits formulée par l’avocat de la partie civile avant de renvoyer l’affaire au 10 avril pour la suite des débats.
MJD