La distribution des cartes d’électeur devait être un moment d’espoir. Elle s’est transformée, pour trop de citoyens, en désillusion. Noms écorchés, lieux de naissance inversés, signatures erronées : ces bévues ne relèvent pas de la simple maladresse administrative. Elles disent un manque de rigueur, une planification fragile et une préparation insuffisante pour une opération d’envergure nationale.
J’en ai fait moi-même le constat lors de mon recensement : agents peu formés, outils mal maîtrisés… Le résultat était, hélas, prévisible. Quand l’exécution chancelle, ce n’est pas seulement un document qui se dévalue, c’est la confiance civique qui se fissure. Or la carte d’électeur n’est pas un carton plastifié de plus : c’est un symbole de souveraineté, la clé d’un droit fondamental et le miroir de notre gouvernance.
Piloter une action nationale exige trois vertus cardinales : sérieux, compétence et anticipation. Le sérieux, c’est d’abord la traçabilité des opérations et la responsabilité assumée. La compétence, c’est la formation des équipes, la standardisation des procédures et le contrôle qualité en continu. L’anticipation, c’est l’audit des risques, le test des outils en conditions réelles et la capacité de correction rapide.
Pour sortir par le haut, il faut passer de l’embarras à l’exigence :
* Reconnaître publiquement les erreurs et publier un plan correctif daté.
* Mettre en place un guichet de rectification proche des citoyens, avec délais garantis et suivi numérique.
* Former et recertifier les agents sur des protocoles simples, vérifiables, opposables.
* Instaurer un contrôle qualité indépendant (échantillonnage statistique, double lecture, contre-signature).
* Ouvrir les données non sensibles (tableaux de bord, volumes corrigés, délais) pour restaurer la transparence.
Gouverner, c’est rendre des comptes. Ici, le compte à rendre est clair : démontrer que l’État sait apprendre de ses failles, corriger ses processus et protéger la dignité du citoyen. Car au-delà du papier, c’est la parole publique qui est en jeu. Et sans confiance, aucune réforme ne tient, aucun scrutin ne rassemble.
Que cette mésaventure devienne un cas d’école de redressement : rigueur opérationnelle, culture de résultat, et respect du citoyen du premier au dernier kilomètre. C’est à ce prix que l’on transforme une crise d’image en leçon de gouvernance.
Abdourahamane NABE
Responsable RSE
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