En amont d’une visite officielle à Conakry, nous lançons un appel solennel au
peuple sénégalais et aux autorités de la République du Sénégal, notamment
à Monsieur le Premier ministre Ousmane Sonko, afin qu’ils se mobilisent contre
les disparitions forcées et la répression brutale exercée par la junte militaire
guinéenne à l’encontre des militants de la société civile.
Depuis le 9 juillet 2024, Oumar Sylla alias « Foniké Mengué », Coordinateur
national du Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC), et
Mamadou Billo Bah, Responsable des antennes et de la mobilisation du
FNDC, ont été enlevés par des éléments du Groupement des Forces
Spéciales et du Groupement d’Intervention de la Gendarmerie Nationale, sur
ordre direct du président de la transition, Mamadi Doumbouya. Cela va faire
bientôt une année qu’ils sont portés disparus, sans aucune procédure
judiciaire, alors qu’ils prenaient part à une campagne citoyenne dénonçant
la censure des médias et la cherté de la vie en Guinée.
Leurs enlèvements s’inscrivent dans une vague de répression plus large visant
des voix dissidentes en Guinée. D’autres citoyens, parmi lesquels Sadou
Nimaga, ancien secrétaire général du ministère des Mines et de la Géologie ;
Habib Marouane Camara, journaliste d’investigation et administrateur du site
lerevelateur224.com; et Ousmane Gnelloye Diallo, militant politique ; ont
également été victimes de disparitions forcées orchestrées par les autorités
guinéennes.
Actuellement en Guinée, critiquer les dérives de la transition, c’est offenser
son chef. Aliou Bah, président du Mouvement Démocratique Libéral
(MoDeL), en a fait les frais. Il à été condamné en appel à une peine de deux
ans fermes pour « offense et diffamation » à l’encontre du président de la
transition, Mamadi Doumbouya.
Le cas de Habib Marouane Camara est particulièrement alarmant : enlevé
violemment le mardi 3 décembre 2024 par des gendarmes en civil, à
proximité du domicile de l’homme d’affaires Kerfalla Person Camara à
Lambanyi (Conakry), il a été extrait de son véhicule après que les agents ont
brisé son pare-brise. Son enlèvement a suscité une profonde inquiétude au
sein de sa famille, de ses collègues et des organisations de défense des droits humains. Ces actes illégaux et récurrents traduisent une dérive autoritaire
extrêmement préoccupante en Guinée, où l’État de droit, les libertés
fondamentales et les droits humains sont systématiquement piétinés par le
régime militaire en place.
Face à cette situation préoccupante, en prélude de sa visite d’amitié et de
travail de 48h en République de Guinée, nous plaidons auprès du Premier
ministre sénégalais, Monsieur Ousmane Sonko, pour qu’il use de sa voix, de sa
légitimité panafricaine et de l’immense espoir qu’il incarne auprès des
jeunesses africaines, afin d’exiger du colonel Mamadi Doumbouya la
libération immédiate et sans condition de tous les otages politiques guinéens.
Nous interpellons également la Communauté économique des États de
l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), la Commission des Droits de l’Homme et des
Peuples de l’Union africaine ainsi que l’ensemble de la Communauté
internationale. Ces instances doivent agir avec fermeté pour exiger des
réponses des autorités guinéennes et assurer la protection des droits
fondamentaux de tous les citoyens guinéens.
En tant que nation ouest-africaine attachée à la paix et à la justice, le
Sénégal partage la responsabilité de ne pas détourner le regard face aux
violations des droits humains dans la région. La solidarité entre les peuples
d’Afrique de l’Ouest impose d’agir avec courage pour défendre ceux qui
sont persécutés pour leurs idées, leur engagement citoyen et leur combat pour la démocratie.
Dakar, 1er juin 2025